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tant à sa place il ne manquât l’occasion d’être vu. Sa perplexité était extrême. Heureusement la jeune fille lança un regard d’amour sur Lieou-thsing au moment même où Lieou-thsing lançait un regard d’amour sur elle. Placée sous les jasmins, elle feignait de prendre les rameaux pour respirer le parfum des fleurs ; et de chercher à droite et à gauche des sensations innocentes ; mais toute son âme, tous ses regards rayonnaient sur Lieou-thsing, Cette situation dura long-tems ; mais enfin pressée par ses femmes de retourner au logis, elle remonta quoique à regret dans sa chaise, et partit escortée comme auparavant.

La jeune fille partie d’un côté, Hoa-thian arriva bientôt de l’autre à cheval et au galop. Voyant Lieou-thsing qui buvait seul sous le feuillage, « J’ai manqué à mon devoir », lui dit-il avec empressement ; « je vous en demande pardon. » Lieou-thsing, plongé dans une rêverie profonde, était immobile sur sa chaise, et paraissait n’avoir rien entendu de ce qu’on lui disait.

Hoa-thian le frappa légèrement sur l’épaule ; « Monsieur Lieou, vous ne me dites mot ; êtes-vous fâché contre moi parce que j’ai tardé à venir ? »

Lieou-thsing, se sentant frappé, sortit de sa rêverie, et se levant aussitôt : « Vous voilà donc de retour, Monsieur Hoa… Que n’êtes-vous venu un instant plutôt ! »

Hoa-thian vit le trouble de Lieou-thsing. « Je vous connais pour un homme sensé », lui dit-il ; « d’où vient donc ce changement subit dans votre air ? Certes il