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jouissait depuis quelque tems n’avait servi qu’à fortifier l’indolence du gouverneur.

Hoa-thian reconnut que, dans un tel état de choses, il ne pouvait point se signaler par l’accomplissement du grand œuvre qui l’avait amené au quartier général, et médita dès-lors une seconde évasion. Il attendait vainement depuis son arrivée l’instant favorable à l’exécution de ce projet. Pour charmer son ennui, il prit un jour les vers de Lieou-thsing, et les lut plusieurs fois avec beaucoup d’attention.

Tandis qu’il savourait cette lecture, on lui apporta un billet de visite en lui annonçant que M. Lieou[1] du Fo-kian venait lui rendre ses devoirs. À cette nouvelle il saisit précipitamment le billet, et voyant dessus le nom de Lieou-thsing, il s’écria, plein de joie et de surprise : « se peut-il qu’il soit venu ? » En même tems il se leva pour aller à sa rencontre.

Parvenu à la porte du salon, il vit en dehors le vieux domestique de la maison Lieou. « Est-ce que ton maître est venu en personne », lui demanda-t-il ?

— « Mon maître », répondit le serviteur, « est en ce moment devant la porte de l’hôtel. » — Hoa-thian jeta les yeux vers la porte extérieure, et alla recevoir son ami la joie dans le cœur et le sourire sur les lèvres. Il vit un jeune homme qui se tenait en dehors dans une attitude respectueuse, et au premier coup d’œil il fut frappé des grâces de sa personne.

  1. Le même que Lieou-thsing. À la Chine, ainsi qu’en Europe, on ne met ordinairement que le nom de famille avec le titre qui correspond à Monsieur.