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ni de plus grand malheur que les tourmens qui en sont la juste punition. » Il ne cherchait pas à répandre sa doctrine. « On cache avec soin, disait-il, un trésor qu’on a découvert. La plus solide vertu du sage consiste à savoir passer pour un insensé. » Il ajoutait que le sage devait suivre le tems et s’accommoder aux circonstances : précepte qu’on pourrait croire superflu, mais qui sans doute devait s’entendre dans un sens un peu différent de celui qu’il aurait parmi nous. Au reste, toute sa philosophie respire la douceur et la bienveillance. Toute son aversion est pour les cœurs durs et les hommes violens. On a remarqué ce passage sur les conquérans : « La paix la moins glorieuse est préférable aux plus brillans succès de la guerre. La victoire la plus éclatante n’est que la lueur d’un incendie. Qui se pare de ses lauriers, aime le sang, et mérite d’être effacé du nombre des hommes. Les anciens disaient : Ne rendez aux vainqueurs que des honneurs funèbres ; accueillez-les avec des pleurs et des cris en mémoire des homicides qu’ils ont faits, et que les monumens de leurs victoires soient environnés de tombeaux. »

La métaphysique de Lao-tseu offre bien d’autres traits remarquables, que je me suis attaché à développer dans mon Mémoire, et que, par divers motifs, je me vois contraint de passer sous silence. Comment en effet donner une idée de ces hautes abstractions et de ces subtilités inextricables où se joue et s’égare l’imagination orientale ? Il suffira de dire ici