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me suis départi d’un silence sans doute bien pardonnable. J’espère qu’on ne me fera pas un crime des motifs qui m’ont empêché pendant long-tems de donner aux savans français mon opinion sur le mérite littéraire d’un compatriote. Tant qu’il s’est borné à faire usage de sa qualité d’Arménien, pour persuader à quelques personnes qui ne pouvaient en juger, qu’il était en état de professer la langue arménienne, j’ai dû respecter le motif d’intérêt qui pouvait le diriger et garder le silence. J’aurais bien certainement continué à tenir la même conduite, si M. Cirbied n’avait pas publié un livre rempli d’erreurs et de suppositions tout-à-fait imaginaires, et propre seulement à donner au monde savant des notions entièrement erronées sur la langue et sur la nation arménienne. La publication de cet ouvrage me met dans la triste nécessité de dissiper des illusions qu’on peut tolérer tant qu’elles sont secrètes, mais qu’on ne peut plus dissimuler quand on en a des preuves imprimées. Si je prends la plume, c’est uniquement par amour pour la vérité, et pour défendre, contre les impressions fâcheuses qu’on pourrait concevoir, l’honneur de ma nation, dont la loyauté et la sincérité sont connues dans tout le monde.

Je le fais aussi pour mon propre honneur ; je ne veux pas que dans l’avenir, et parmi mes compatriotes surtout, on puisse dire que, moi étant à Paris, on a publié un ouvrage de cette nature, et que j’ai gardé un silence blâmable. Qui tacet confirmat.

Je ne connaissais jusqu’à présent de M. Cirbied,