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désordre ou immoralité. Véritablement on trouve aussi sous cette classe les termes qui signifient beauté, charmes extérieurs, tendresse maternelle, repos. Il y a une foule de ces mots composés qu’il est intéressant d’analyser. Les missionnaires en ont cité quelques-uns mais ils sont loin d’avoir épuisé la matière, ou même de l’avoir étudiée sous le rapport le plus curieux. On ne saurait compter les traditions, les allusions les rapprochemens inattendus, les traits piquans et épigrammatiques qui sont ainsi renfermés dans les caractères composés ; et il est impossible d’imaginer combien on pourrait en faire jaillir de lumières sur les anciennes opinions morales ou philosophiques des peuples primitifs l’Asie orientale. Il suffirait d’étudier avec soin, et en se garantissant de l’esprit de système, ces expressions symboliques où les Chinois se sont peints sans y penser, eux, leurs mœurs et tout l’ordre de choses dans lequel ils vivaient, et que l’histoire nous fait si imparfaitement connaître, parce qu’il date d’un tems où il n’y avait pas encore d’histoire. La paléographie chinoise n’est pas l’étude des formes variées que le caprice a fait prendre aux lettres, moins encore l’étude des abréviations et des ligatures, des accens et de la ponctuation : c’est véritablement l’étude des anciennes traditions, des vieux usages, des mœurs antiques. C’est sous ce rapport qu’elle mérite une attention toute particulière ; car l’histoire des mots n’a droit à nous intéresser qu’autant qu’elle conduit à l’histoire des choses.