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pénétraient dans la soute entre les interstices des boiseries mal jointes annonçaient le lever du soleil.

Au-dessus de nous, nous entendions le bruit bien connu des manoeuvres d’appareillage. La marche lourde des matelots virant au cabestan pour la levée de l’ancre. Des bruits sourds et rapides ébranlaient les planches du pont. Les commandements du capitaine nous arrivaient confus. C’était bien le branle-bas du départ. Le pilote devait être à bord.

En proie à une poignante émotion, nous étions tout entiers à la perception des bruits extérieurs. Le navire ne bougeait plus. Pendant deux mortelles heures nous n’entendîmes plus rien et ne savions comment expliquer ce silence.

Un imperceptible roulis nous berçait à peine.

Cependant, nous disions-nous, l’ancre est amarrée à bord. Qu’attendons-nous pour partir ? Quel accident retarde notre fuite ?

L’inquiétude nous envahissait, muette, profonde ; nous n’échangions pas une parole, dévorant l’anxiété cruelle qui nous étreignait.

Vers neuf heures du matin, autant que nous pouvions en juger, un panneau s’ouvrit près de nous. Une main nous passait un petit carré de papier et une bouteille de vin.

Nous pûmes lire cette phrase : « Pas de vent, le pilote déclare la sortie impossible, il propose de remettre le départ ! »

Notre complice Vallerstein avait pensé à nous.

Une heure plus tard, nouveau billet : « Le capi-