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cette construction des plus primitives. Au centre de la hutte, une table boiteuse, construite avec les débris d’une caisse à biscuits ; autour de la table, trois grossiers escabeaux composaient avec celle-ci et la gamelle de campement le luxueux mobilier des anciens rédacteurs de la Marseillaise.

Je pénétrai dans une sorte de caveau sombre et sans air. C’était la chambre à coucher. Une toile de hamac tendue sur quatre piquets et un matelas de 2 centimètres d’épaisseur représentaient la literie.

Sur une grande caisse en bois, une centaine de volumes d’histoire, des livres d’anglais et d’allemand, indiquaient les goûts studieux des maîtres du logis.

Paschal Grousset, enveloppé d’une mince couverture, lisait un volume de l’histoire moderne de Gervinus.

Mon arrivée était pour lui plus qu’une surprise ; nous nous jetâmes dans les bras l’un de l’autre. À ce moment, Rochefort et Olivier Pain firent leur entrée. L’auteur de la Lanterne tenait à la main une canne à pêche ; son pantalon de grosse toile, retroussé au-dessus du genou, laissait à nu sa jambe nerveuse ; il était coiffé du chapeau de paille réglementaire et avait aux pieds une paire de superbes godillots grands comme un berceau d’enfant.

C’était toujours notre gai compagnon de Boyard. Arrivé seulement depuis deux mois, cette vie étrange de Peau-Rouge ne paraissait pas l’affecter ; nageur et pêcheur enragé, il se livrait avec Olivier Pain aux