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LES DÉCORÉS

lence, de recueillement et de songe, désireux de revoir, avec ses yeux définitivement ouverts, ces flèches, ces pignons, ces cloîtres, ces quais, ces béguinages, ces eaux endormies, ces rues abandonnées, tout ce qui devait constituer son œuvre et donner l’éclosion à une flore inconnue d’une distinction précieuse et hautaine, Rodenbach retourna dans sa ville natale.

Plus tard, quand il se fixa définitivement en France, heureux cette fois d’échapper à un étouffant cauchemar, de secouer la mélancolie affreuse suintant de l’ombre des clochers et de l’humidité des murs, il était imprégné jusqu’aux moelles de ces Flandres auxquelles il avait voué ses virginales tendresses. Malgré ses cravates claires, ses hauts-de-forme gris, ses gilets blancs, ses boutonnières fleuries, malgré sa causticité mordante, son sourire railleur, son ironie boulevardière, malgré son parisianisme affiné qui le pousse à fréquenter quelques salons artistiques, le Théâtre-Libre, l’Œuvre, l’Opéra quand on joue du Wagner,