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LES DÉCORÉS

fauves ; à la ceinture qui serre sa vareuse, pend la gaine d’un revolver, et un remington lui sert de stick. Quant à l’autre, au mondain, au boulevardier…, il y a maldonne, connais pas. Sans se l’avouer, l’invétéré nomade aime peu notre grande ville, qui pourtant le choye et le gâte — l’ingrat — dès qu’il daigne nous favoriser de sa présence.

Mais, sous des allures décidées, se cache un timide, préférant affronter une tribu d’anthropophages plutôt qu’entrer dans un salon où coquètent et caquètent une vingtaine de dames décolletées ; et puis, en véritable oiseau de tempête, la monotonie de notre existence si banale — malgré l’inutile agitation de chaque jour — l’énerve et l’ennuie. Pour se sentir heureux, il a besoin de braver le danger, de se lancer dans quelque périlleuse aventure, de se créer d’inextricables difficultés. Fantasque, nerveux, primesautier et sensitif, ses tendances, et même ses affections, subissent des sautes brusques, des bouleversements dont il serait