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DE TOULOUSE-LAUTREC

godaille ! Son crayon, qui brûle et qui mord, rend des arrêts implacables, comme ceux d’un justicier inflexible.

Ces souteneurs aux crânes de poisson, aux bajoues flasques, aux groins rasés, aux lèvres baveuses ; ces mondains hébétés dont la chétivité chlorotique se dissimule mal sous l’habit noir ; ces calicots en bordée dont les moustaches trop cirées coupent en deux les faces gélatineuses, et dont les pantalons collants accusent les genoux cagneux et les mollets zébrés de varices ; ces filles aux tétines boursouflées, aux gueules sabrées de carmin, aux tignasses badigeonnées d’ocre, aux regards pourris ; ces rouleuses phtisiques dont les panaches évoquent, en avance de quelques jours, la pompe macabre des corbillards ; ces vendeuses d’amour, goules sorties de l’égout, qui feraient lever le cœur à un Aïssaoua, oui, toute la bande est stigmatisée, d’une façon superbe et définitive, dans des croquis, des pastels, des lithographies, des toiles, d’où s’éva-