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SÉVERINE

jette — dans le désert hélas ! — un cri de justice et de colère ; elle garde la main qui panse les plaies, les yeux qui pleurent, le verbe qui console, le cœur qui compatit.

Pleine de tendresse pour les petits, les humbles, les faibles, les déshérités, sa pitié, toujours inassouvie, la pousse à prendre la défense du vaincu contre le vainqueur, quel que soit son drapeau et son parti. On sent bouillonner en elle la foi ardente de l’apôtre, l’exaltation sainte du croisé, et, dans la conversation, son œil clair de paysanne se brouille subitement quand on parle de notre mécanisme social dont la férocité nous amène à regretter les naïves brutalités du Moyen-Age.

La sincérité de ses convictions, l’énergie de ses revendications, l’élévation de ses idées, la personnalité incisive de son style, vivifient les sujets les plus banals, et drapent parfois d’une superbe éloquence le plus insignifiant fait-divers. Ses articles détonnent étrangement à côté des insipides papotages qui forment