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acrobate dont il a parlé dans ses Odes funambule sques, qui bondit dans des régions de plus en plus élevées.


   « Enfin, de son vil échafaud
Le clown sauta si haut, si haut,
Qu’il creva le plafond de toiles,
Au son du cor et du tambour,
Et, le cœur, dévoré d’amour.
Alla rouler dans les étoiles. »



II.


Mais le cas de Théodore de Banville est une exception, et il serait injuste de faire peser sur toute l’École Parnassienne un reproche que méritent seuls certains de ses représentants, et des moins qualifiés. On dit quelquefois que les vers des Parnassiens sont vides de contenu, et que leur seule beauté consiste dans la forme. C’est une erreur et c’est une injustice. C’est précisément le contraire qui est vrai. Les Parnassiens (je ne parle ici que des maîtres) sont des savants et des érudits. Je ne vois guère que Fr. Coppée qui se pique d’ignorance. Appelé à présider une distribution des prix, il y a quelques années, il a ingénument confessé qu’il avait toujours été, sur les bancs du lycée, un mauvais élève, ce qu’on appelle un cancre, et au risque d’être un objet de scandale, il a fait l’éloge de cette paresse, qui l’a mené tout droit à l’Académie. Mais il n’y a pas lieu de prendre trop au sérieux ces déclarations. Quant aux autres Parnassiens, ils ont tous un goût manifeste pour la science et l’érudition. Sully-Prud’homme est psychologue et philosophe. S’il n’avait pas fait des vers, il aurait fait une belle thèse philosophique, et serait aujourd’hui membre de l’Académie des sciences morales et politiques. Hérédia sait le blason — il est épigraphiste, latiniste, historien : rien ne l’empêcherait d’être membre de l’Académie des inscriptions et belles lettres. Quant à Leconte de l’Isle, dont je voudrais