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452 ' Quelque parti que vous preniez , vous ne plairez me- diocrement a aucun homme d’un gout vrai, et, si vous deplaisez aux femmes , ce sera toujours votre faute, et parce que vos apparences n’auront pas assez repondu a toutes vos realites ; je vous le dis et j’en suis sur. Evitez cette disparate; ne vous faites pas meoonnaitre et ne vous oalomniez jamais. Si vous voulez garder quelques imperfections, n’ayez que des defauts aimablos et propres a vous faire aimer. Tous les autres, quelque innocents ou 'inconnus qu'ils pussent etre , seraient trop peu digues de vous. Ayez souveut un peu d’humeur, · pour delasser votre raison; mais que cette humeur soit legere, et n’en mon- trezque ce qu`il faut pour votre propre amusement et pour l’amusement des autres. Vous seriez trop reprehensible , aussi bien que trop malheureuse , si elle devenait leur tourment. » Permettez-vous quelques caprices , mais qui soient courts et peu marques , et qui laissent apercevoir, com- me un eclair dans le lointaiu, les agréments°et le sourire de votre imagination. Gardez vos siugularites ; mais tant que vous serez tres- jeune, ne les montrez qu’aux connaisseurs; et qu’au gre des plus difficiles , elles vaillent mieux que l’usage , que la coutume, que la mode : le monde n’en veut qu’a ce prix. . Conservez dans votre maintien, dans votre ton , dans ' vos maoieres et dans toutes vos habitudes, une certaine I negligence, une apparence d’abandon et un air de dis- traction quej’ai cru remarquer en vous, malgre votre vi- vacite. Mais que tout cela soit semblable a ce qui est mo- dele en ce genre, ct puissc cn servir it son tour. Digiiized by