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LXVII.

Villeneuve-sur-Yonnc , 28 octobre 181 I.

A M. dc Fontancs , d Paris.

Ah! monsieur le grand-maltre, au nom du ciel et de vous-méme, gouvernez patcrnellement , noblement ct loyalement, justement et royalement , et, pour tout dire en un mot qui ne peut étre dit qu’a vous, gouvernez poétiquement.

0n vous fait commettre tous les jours, dans vos operations officielles, des actes do lésine qu’on ne passerait pas a un auteur de charades. J’ai vu des prosateurs s’en indiguer. Oui, j’ai vu se lever des épaules .... et quelles épaules, encore! .celles de l’abbé Desrenaudes. J’ai vu une téte se secouer.. .. et quelle téte l la plus longue du conseil et de l’Institut, la téte de M. Cuvier. Sa bouche méme articulait en grommelant le mot elfrayant dkwarice. A propos d’avarice , les vices nous poursuivcnt jusqu’a notre dernier moment. Il serait bien singulier et bien déplorable qu’ayant si bravement échappé, pour votre propre compte , au plus triste et au plus hideux de tous , il se fut emparé de vous au nom de l’Université. J’ai peur qu’il n’en soit quelque chose; d’autant plus qu’on vous voit obsédé , tous les matins , par une espece de cauchemar, dont le poids et les inspirations assoupissent tout ce que vous avez en vous de liberal et de bénin. Je veux le faire peindre en diable , ou , pour mieux dire , en diabloteau, marchant un peu écarquillé , tenant une bourse a la main, rubicond comme un diable plein, et riant d’un rire nigaud. ll ressemblera, trait pour trait, a Mammoun, quand il était jeune.