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277 plus en plus digne; qu’il demcure maltre longtemps. ll · l'est , certes, et il sait -l‘étre. _Nous avions grand besoin de luil .... Mais il est jeune,_il est mortel , et je méprise toujours inliniment ses associésl Je ne vous ai pas encore parlé de ma bonne et pauvre mere. ll faudrait de trop longnes lettres pour vous dire tout ce que notre reunion me fait éprouver de triste et de doux. Elle a en bien des chagrins, et moi·méme je lui en ai donné de grands, par ma vie éloignée et philosophique. Que ne puis-je les réparer tous, en lui rendant un Els a qui aucun de ses souvenirs ne peut reprocher du moins de l’avoir trop pen aiméel Elle m’a nourri de son lait, et ii jamais, » me dit-elle souvent, ii jamais je ne persistai a pleurer, sitot que j’en- ii tendis sa voix. Un seul mot d’elle , une cbanson , arre- << taient sur-le-champ mes cris , et tarissaient toutes mes ii larmes , méme la nuit et endormi. » Je_ rends grace ii la nature qui m’avait fait un enfant doug; mais jugez combien est tendre une mere qui, lorsque son Iils est de- venu homme, aime a entretenir sa pensée de ces minu- ties de son berceau. - Mon enfanoe a pour elle d’autres sources de souvenirs maternels qui sem blent lui devenir plus délicieux tous les jours. Elle me cite une foule de traits de ma tendresse , dont elle ne m’avait jamais parlé, et dont elle me rap- pelle fort bien tous les détails. A chaque moment que le temps ajoute it mes années , sa mémoire me rajeunit; ma presence aide ii. sa mémoire. Ma jeunesse fut plus pénible pour elle. Elle me trouva si grand dans mes sentiments, si éloigné des routes or- dinaires de la fortune, si net de toutes les petites passions qui la font chercher, si intrépide dans mes espérances, si l Digiiized by Gccgle