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les expressions de la nature morale, je veux dire le sentiment de la maternité unie à la virginité : idée inconnue à l’art ancien, qui n’en a point traité où fussent exigées autant de délicatesse et de retenue ; idée où l’art moderne, épuisant toutes les beautés, sous les pinceaux de Raphaël, a peut-être surpassé toutes les merveilles précédentes.

Quand le peintre veut représenter un événement, il ne saurait mettre en scène un trop grand nombre de personnages ; mais il n’en saurait employer trop peu, quand il ne veut exprimer qu’une passion.

Les sculpteurs et les peintres ne nous montrent guère que des corps inhabités. Les plus habiles, comme Gérard, prennent la vie pour dernier but, et ne font que des corps vivants.

Et pourtant, il ne suffit pas même, pour atteindre l’objet de l’art, qu’un personnage semble animé d’une passion : il faut une passion où l’âme participe. Tout peintre et tout statuaire qui ne sait pas montrer, dans toutes ses figures, l’immatérialité et l’immortalité