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X.

Villeneuve-sur-Yonne , le 29 mars 1795.

A madame de Beaumont, à Passy.

J’ai , Madame , l'honneur de vous envoyer le troisieme volume, dont je suis si exccssivement mécontent, que je n’ai pas voulu coucher avec lui dans la meme chambre, et que je l’ai banni de moi toute la nuit.

Je me suis armé de resolution , pour rendre ce matin aux deux autres les entrees de mon appartement. Je me ferai effort pour les lire.

Dans ce que j’ai pu parcourir, le crime qui interroge garde une sorte de dignite , et semble avoir un peu raison , tandis que l’innocence qui repond et qui s’excuse , consent presque in avoir tort. C’est une histoire exécrable et menteuse , et si votre exemplaire existait seul dans l’univers , malgre le respect dont je suis penetre pour tout ce qui vient de vos mains , je le brulerais tout a l’heure.

J’aurais trop a dire , et les raisons sur lesquelles ma maniere de sentir est fondee sont encore dans une trop vive fermentation , pour que je n’en renvoie pas les details au temps ou j`aurai le bonheur de vous revoir.

Agreez , Madame , les assurances des regrets que je donnerai toute ma vie in vos departs, toutes les fois que la destinée me fera votre voisin. °