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236 bon sens , ou de mon bon ctnur, ou de ma bonne vo- lonté, et que ces citations rendissent tous les coeurs plus gais , mieux disposés et plus contents. Je voudrais que , jusqu’a la tin , ils se souvinssent ainsi de moi, qu’ils fussent heureux , et qu’ils eussent une longue vie ,. pour s’en souvenir plus longtemps. Je voudrais _ avoir un tombeau ou ils pussent venir en troupe, dans L un beau temps ,‘ dans un beau jour, pour parler ensem- ble de moi, avec quelque tristesse , s’ils voulaient , mais avec une tristesse douce· , et qui n’exclut pas toute ]-oie. _ I Je voudrais stutout , et fordonnerais , si je le pouvais , que , pendant cette tendre cérémonie , pendant l’aller et le retour, il . n'y out , dans les sentiments et dans les contenances , rien de lugubre et rien de repoussant , en sorte qu’ils olfrissent un spectacle qu’on fut bien aise d’avoir vu. Je voudrais , en un mot, exciter des regrets · tels que ceux qui en seraient témoins ne craignissent ni de les éprouver, ni de les inspirer eux-memes. C’est I l’image des regrets aifreux que l’on doit laisser apres soi·, qui rend en partie la mort si amere; ce sont les horreurs dont on a environné la mort qui rendent , a leur tour, les regrets des survivants si terribles. Ces deux causes agissent perpétuellement l’une sur l’autre , et boulever-· ` sent les ames dans leurs sentiments les plus louables et les plus inévitables. Nos passions ont fait de notre der- niere heure un sujet de désespoir et d’eEroi , un mo- ment hai , d’oi1 la prévoyance et le souvenir se détour— nent également. Nos institutions et nos coutumes en out fait, in leur tour, un événement dont on se hate d’ou·· blier, le plus vite qu’on peut, l’épouvantable appareil. Au lieu de nous aocoutumer des l’enfanoe , par la pen- sée et par les Sens , it ne regarder cette Separation que ‘ ` I 1