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perdus. C‘est d’elle seulement qu’ils peuvent se soucier; car elle est seule digne d’eux. Ceux qui y participent ici-bas ne leur en dérobent rien. L’idée de partage qui , pour nous aveugles , est inseparable de l’idée de diminution , parce que l’un ne s’opere point sans l’autre , sur les objets matériels que nos mains taltonnent sans cesse. n’offre a ces étres clairvoyants qu’une impression d’étendue qui leur plait et les réjouit.

Ah ! si nous devenons des anges , (et que pouvons-nous devenir autre chose dans une meilleure vie ?) sans doute alors nous desirous que ceux qui nous furent chers, puissent étre assez semblables a nous-memes, pour aimer comme nous , d’un amour entier et parfait, tous les étres sensibles et bons. Cela ne leur est pas possible, hélas ! leur coeur est trop borne. Mais du moins, la part de tendresse que nous exigeons d’eux, par un ressouvenir des impressions rogues au temps de la mortalité, est-elle compatible avec toutes les allections qu’ils sont capables d’éprouver , dans leur prison passagère , et dont leur condition sur la terre leur fait un devoir autant qu’un plaisir.

Il n’y a la d’autre exaltation que celle qu’il faut pour s’élever au-dessus de la vie présente. Il vous en faut bien davantage pour vos ombres et vos mdncs, mots qui, en enveloppant d’une espece de corps vaporeux les esprits de vos chers amis , vous les représentent encore imbus des passions et des grossieretés bumaines , et ne les laissent se peindre a votre imagination que sombres, et tristes et morts; idées injurieuses et fausses , si l’opinion de fimmortalité , qui est la votre et que je partage , est vraie , consolante et belle ....

Il m’est venu, pendant que j’écrivais ces vagues con-