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agréments exigent plutôt un grand maître qu’un grand homme.

Voltaire a, par son influence et le laps du temps, ôté aux hommes la sévérité de la raison.

Il a corrompu l’air de son siècle, donné son goût à ses ennemis mêmes, et ses jugements à ses critiques.

J-J Rousseau avait l’esprit voluptueux.

Dans ses écrits, l’âme est toujours mêlée avec le corps, et ne s’en sépare jamais. Aucun homme n’a fait mieux sentir que lui l’impression de la chair qui touche l’esprit, et les délices de leur hymen.

J-J Rousseau donna, si je puis ainsi m’exprimer, des entrailles à tous les mots, et y répandit un tel charme, de si pénétrantes douceurs, de si puissantes énergies, que ses écrits font éprouver aux âmes quelque chose d’assez semblable à ces voluptés défendues qui nous ôtent le goût et enivrent notre raison.