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Voltaire eut l’esprit mûr vingt ans plus tôt que les autres hommes, et le conserva dans sa force trente ans plus tard. L’agrément que nos idées prêtent quelquefois à notre style, son style le prêtait à toutes ses idées.

Voltaire conserva toute sa vie, dans le monde et dans les affaires, une très-forte impression de l’esprit de ses premiers maîtres.

Impétueux comme un poëte, et poli comme un courtisan, il savait être insinuant et rusé comme un jésuite. Personne n’a observé plus soigneusement, mais avec plus d’art et de mesure, la fameuse maxime dont il s’est tant moqué : se faire tout à tous. il avait le besoin de plaire, plus encore que celui de dominer, et trouvait plus de plaisir à mettre en jeu ses séductions que sa force. Il mit surtout un grand soin à ménager les gens de lettres, et ne traita jamais en ennemis que les esprits qu’il n’avait pu gagner.

Voltaire, esprit habile, adroit, faisant tout