les arts, certaines phrases et certaines couleurs ne sont là que pour en faire mieux apercevoir d’autres. Seules, elles ne seraient rien ; mais elles deviennent puissances par leur effet, et cet effet n’est pas dû à leur nature ou à leur valeur propre, mais à la place qu’elles occupent, à l’application qu’on en fait. Leur voisinage en fait le prix, leur isolement le néant.
Il vient dans la tête beaucoup de phrases inutiles, mais l’esprit en broie ses couleurs.
Il faut dire ce qu’on pense, pour être content de soi et de ce qu’on dit ; mais pour être éloquent, fécond, varié, abondant, pour être orateur, en un mot, il est peut-être nécessaire de n’avoir à dire que ce qu’on pense à demi, vaguement, depuis peu, à l’instant même. La chaleur des pensées, en effet, vient de leur nouveauté, et leur surabondance, des indécisions mêmes de l’esprit. Le sage, c’est-à-dire, celui qui ne met au grand jour que ce qu’il a mûri, le sage peut être éloquent comme un oracle ; mais il ne sera jamais disert comme Cicéron. Pour faire aisément de beaux discours,