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Ce n’est pas tant la ressemblance que l’essence de nos pensées, leur suc, leur extrait, leur vertu, qui doivent entrer dans nos discours.

Il ne faut décrire les objets que pour décrire les sentiments qu’ils nous font éprouver, car la parole doit à la fois représenter la chose et l’auteur, le sujet et la pensée. Tout ce que nous disons doit être teint de nous, de notre âme. Cette opération est longue, mais elle immortalise tout.

Il faut qu’un ouvrage de l’art ait l’air, non pas d’une réalité, mais d’une idée. Nos idées, en effet, sont toujours et plus nobles, et plus belles, et plus propres à toucher l’âme, que les objets qu’elles représentent, quand, d’ailleurs, elles les représentent bien.

Loin d’employer la réalité, c’est toujours avec des clartés qu’on doit représenter les