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convictions plus libres que M. Joubcrt avait dès longtemps ouvertes ou préparéesii son esprit. Bien plus, le temps u’était point eloigné où, par un de ces retours qui n’appartiennent qu’aux esprits sincères, M. de Fontanes devenait un des plus vifs admirateurs de Shakspearc, de Richardson, de lord Byron lui-même… Et qui pourrait aflinncr que, vers les dernières années de sa vie, quand ses amis lui reprochaient de négliger sa gloire, il n’y avait pas, dans cet abandon de la muse, un excès de sévérité pour lui-même, le découragement secret du génie et comme un de ces scrupules virgiliens qui vouent les épopées aux flammes ?

11 n’avait pas toutefois cédé sans combattre aux influences qui devaient ainsi le modilier. Je retrouve, dans quelques lettres adressées par lui de Londres à son contradicteur, la trace de leurs débats. Conduit en Angleterre, vers la fin de 1783, par le projet, bientôt abandonné, d’une Revue littéraire quiIs avaient espéré de fonder en commun, il gourmandait assez vivement M. Joubcrt sur son goût pour les écrivains d’outre-Manche :

%Les idées changent étrangement quand on habite « Londres », lui écrivait-il. « Vous avez entendu dire « quelquefois que Richardson était moins admiré des « Anglais que de nous ; mais on est loin de vous avoir « tout appris. Le fait est que Richardson est à peine lu « aujourd’hui. On le trouve hors denature, sans éloquence « et surchargé de longueurs. Paméla est dans le mépris ; « Clémentine seule fait lire Grandisson, et Clarisse est « mise fort au-dessous de tous les romans de Fielding, « sans exception. Voilà la vérité ; le contraire n’est que « mensonge. À Paris je n’oserais parler de ce que j’en-