Barthou, ministre des Travaux Publics, porta la question devant le Conseil d’État, qui, le 12 janvier 1895, la trancha en faveur des compagnies. Friand de popularité parlementaire, le ministre donna sa démission, alléguant que son attitude antérieure ne lui permettait pas d’appliquer l’arrêt du Conseil[1]. Dupuy le pria de garder son portefeuille[2]. Barthou s’obstina. Poincaré, ministre des Finances, annonça son intention de le suivre dans sa retraite. Les ministres se réunirent, le 14 au matin, à l’Élysée, informèrent le Président de la République. C’était la crise. Belle occasion pour le Cabinet d’affirmer son indépendance à l’égard des grandes puissances d’argent. Comme l’arrêt était sans appel, Casimir-Perier, le riche Perier, l’homme d’Anzin, aurait seul la responsabilité de l’accepter. Le Président vit le piège, refusa d’y tomber, déclara que sa propre démission accompagnerait celle des ministres.
Les ministres cédèrent, sauf Barthou, déjà parti. Ils iraient se faire renverser par la Chambre. Dupuy, Poincaré, l’un brutal, l’autre subtil, pousseraient à leur propre chute.
Millerand interpella, reprochant au Gouvernement d’avoir créé le litige, engagé à tort l’action devant le Conseil d’État, au lieu d’inviter le Parlement à affirmer sa volonté souveraine. Il proposa, au nom des socialistes, la nomination d’une commission d’enquête chargée de statuer sur la mise en accusation de Raynal, pour crime commis dans l’exercice de ses fonctions, comme