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LE PROCÈS


avec Bertillon (ce qui était vrai) ; il a communiqué avec Gobert (ce qui était faux) ; Gobert a commis des indiscrétions, colporté à la Banque de France un document confidentiel de Dreyfus qui lui avait été remis pour ses comparaisons ; il a appris ainsi, l’accusé étant connu à la Banque, son nom, qu’il avait demandé en vain au général Gonse.

Dreyfus établit qu’il n’avait jamais été à la Banque ; Gobert, qu’il avait su le nom de l’officier soupçonné à l’aide de sa feuille signalétique, qu’il tenait de Gonse avec d’autres pièces. Les nom et prénom de Dreyfus y avaient bien été découpés, mais on y avait laissé sa date de naissance, les dates de ses promotions ; l’expert, sachant de Gonse qu’il s’agissait d’un officier d’artillerie, n’avait eu qu’à ouvrir l’annuaire pour connaître le nom[1].

Du Paty, d’une inlassable maladresse, inflige un démenti à Gobert, nie que la feuille signalétique fût au dossier ; Maurel va aux preuves, et trouve la feuille telle que l’expert l’a décrite[2].

Mais ce vif incident ne tourne qu’à la confusion de Du Paty ; Brisset, descendant de son siège, montre à Gobert des pièces de l’écriture de Dreyfus : « Qu’auriez-vous conclu, si vous les aviez eues pour vos comparaisons ? » L’expert les examine, répond que son avis n’en eût été modifié en rien. Mais il sent que l’opinion du commissaire du Gouvernement est inébranlable et que les insinuations de Gonse ont porté.

  1. Cass., I, 272 ; Rennes, II, 304, Gobert.
  2. Cass., I, 272, Gobert.