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LE PROCÈS

VIII

Cependant, à la deuxième audience[1], l’inanité et les contradictions des charges publiques apparurent dans une lumière toujours plus crue.

Demange ayant demandé l’apport de la note de Boisdeffre sur la suppression des manœuvres pour les stagiaires, Du Paty, chapitré pour sa maladresse, était revenu à son interprétation du mot « manœuvres » par « voyage d’État-Major »[2]. Brisset la reprendra dans son réquisitoire. Selon lui, « Dreyfus ne pouvait pas écrire : « Je pars en voyage d’État-Major, » car c’eût été signer la lettre missive[3] ».

Parurent ensuite à la barre les officiers qui avaient été les camarades ou les chefs immédiats de Dreyfus, antisémites et envieux, qui, depuis qu’il était accusé d’un crime horrible, avaient découvert qu’ils s’étaient toujours méfiés de lui, que ses allures étaient louches et qu’il cachait, sous son désir de s’instruire, sa chasse avide aux renseignements.

Ils reprirent longuement, surtout Bertin et Boullenger, les racontars que D’Ormescheville avait déjà recueillis. Aucune pitié ne leur vint, à l’aspect de leur frère d’armes sous le coup d’une telle inculpation, plongé dans un tel désastre. Gendron reprocha à Dreyfus, comme une autre trahison, d’avoir allégué ses visites à une femme pour excuser les siennes.

Ce bas déballage de menus faits, de conversations

  1. 20 décembre 1894.
  2. Rennes, III, 713, Demange.
  3. Cass., III, 602, Demange.