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LA CAPITULATION DE MERCIER


lui-même, est tristement caractéristique. Il a « dans la tête » que la pièce est ancienne, « d’avant l’affaire Greiner », d’une époque où Dreyfus n’était pas encore à l’État-Major. Il la trouve peu significative. Mais comme elle porte une initiale, — et c’est l’initiale de Dreyfus ! — il opine qu’il convient de la retenir. L’officier instructeur s’en débrouillera.

Les autres pièces parurent peu importantes, « de petites bribes, de petits morceaux », recollés au hasard, « tout le caput mortuum de la section[1] ». Sandherr en élagua plusieurs, « refit trois ou quatre fois le paquet ».

C’étaient une lettre de Panizzardi, une note de Guénée, le brouillon de Schwarzkoppen. Le bon sens indiquait qu’il s’y agissait de personnages différents. Sandherr espéra qu’ils pourraient tous être réduits à un seul, que l’un ou l’autre, du moins, serait Dreyfus. Il y joignit quelques pièces de comparaison et porta son dossier à Boisdeffre, qui en saisit Mercier.

VI

Que se passa-t-il entre ces deux hommes ? Emporteront-ils leur secret dans la tombe, laissant, ici encore, un de ces trous d’ombre qui sont les fondrières de l’histoire ?

Tous deux, d’abord, ils avaient cru Dreyfus coupable ; son arrestation précipitée, dans une espèce de guet-apens, était leur œuvre commune. Boisdeffre, comme Mercier, avait été sourd aux avis de Saussier.

Pourtant, même alors, ils avaient eu des doutes, et

  1. Rennes, II, 514, Cordier.