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LA CAPITULATION DE MERCIER


taché allemand. Mais quand l’Allemand, bon camarade, essayait d’obtenir quelque renseignement de nature à intéresser l’Italien, Esterhazy refusait. Ancien zouave pontifical, il détestait l’Italie.

Le 1er novembre, la Libre Parole ayant donné le nom de Dreyfus, Schwarzkoppen respire. « Ce n’est pas mon homme[1] ! » Il en avise aussitôt Panizzardi. Mais qu’est-ce que Dreyfus ? Ni Panizzardi ni Schwarzkoppen ne le connaissent.

Les assertions formelles et contradictoires des journaux les intriguaient. Selon la Libre Parole, « Dreyfus a fait des aveux complets, et on a la preuve absolue qu’il a vendu à l’Allemagne les secrets de la défense. » D’autres journaux, la plupart, le disaient aux gages de l’Italie. Comme il n’était fait aucune allusion aux attachés militaires, Panizzardi supposa que Dreyfus avait pu être en relation directe avec le chef de l’État-Major italien. De même, Schwarzkoppen, en ce qui concerne l’Allemagne, tout en s’étonnant qu’il n’en eût pas été informé.

Panizzardi écrivit au général Marselli, commandant en second de l’État-Major à Rome. Il lui fit part de l’émotion produite par l’arrestation de Dreyfus, s’empressa d’assurer son chef qu’il n’avait jamais eu de rapport avec « cet individu », que « son collègue allemand n’en sait rien » ; il termina par cette question déguisée : « J’ignore si Dreyfus avait des relations avec le commandement de l’État-Major[2]. »

  1. « Schwarzkoppen revint chez moi me dire : « C’était une fausse alerte, ce n’est pas mon homme. » (Récit fait, le 17 février 1898, par Panizzardi à Henri Casella ; Réforme de Bruxelles du 18 mai 1898.) — Ce récit m’a été confirmé par le comte Tornielli.
  2. Voici le texte de cette pièce, qui fut remise, le 5 janvier 1899, par le comte Tornielli à Delcassé, ministre des Affaires étrangères, et transmise, le 3 février, par Paléologue, secré-