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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


verie qui lui a imposé le silence. » « Sans la note publiée par la Libre Parole, il y a trois jours, Dreyfus était sauvé[1]. »

Désormais, chaque matin, à coups redoublés, Drumont frappe sur Mercier, vendu aux juifs. « Si on fusille Dreyfus, ils sentent que c’en est fait de leur puissance[2]. » Donc, ils ont mis à Mercier le marché à la main et l’effrayent de sinistres menaces. Ainsi, le chantage qu’il entreprend, Drumont l’attribue à ses ennemis et à ses victimes, selon l’éternelle tactique des voleurs poursuivis. Tout le long de ce drame qui commence, l’État-Major, la Congrégation et leur presse n’en auront point d’autre.

C’est un torrent inépuisable d’injures : « Regardez ce ministère de la Guerre qui devrait être le sanctuaire du patriotisme et qui est une caverne, un lieu de perpétuels scandales, un cloaque qu’on ne saurait comparer aux écuries d’Augias, car aucun Hercule n’a encore essayé de les nettoyer. Une telle maison devrait embaumer l’honneur et la vertu ; il y a toujours, au contraire, quelque chose qui pue là dedans[3] ». « Il y a près de 40.000 officiers dans l’armée ; le Mercier choisit, pour lui confier le secret de la défense nationale, un cosmopolite-né : n’est-ce pas que ce Mercier est bien vil[4] ?

  1. Libre Parole du 2 novembre. — L’Éclair s’attribue également une part de cette victoire : « C’est à obtenir ce résultat du ministre lui-même (l’ouverture d’une instruction judiciaire) que nous nous sommes employés depuis le moment où, mettant les points sur les i, nous avons poussé à l’aveu nécessaire. » (4 novembre.)
  2. Libre Parole du 4 — « La juiverie lui met le marché à la main ; c’est Reinach qui mène toute l’intrigue. » (5 novembre).
  3. Libre Parole du 5, article de Drumont intitulé : « Le ministère de la Guerre ».
  4. Libre Parole du 6, article de Drumont intitulé : « Les Juifs dans l’armée. »