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LE BORDEREAU


dernière réunion « où seraient décidés les détails de l’arrestation[1] ».

La réunion comprenait, avec le ministre, le général de Boisdeffre, le général Gonse, le colonel Sandherr, Du Paty et Cochefert.

Mercier ratifia d’abord le plan de Du Paty, « l’épreuve de la dictée ». Il décida ensuite que Dreyfus serait appréhendé de toutes manières, qu’il se troublât ou non. Il donna à Du Paty « l’ordre ferme de l’arrêter, indépendamment de l’épreuve[2] ».

La scène aura lieu dans le propre cabinet du général de Boisdeffre ; Cochefert y assistera avec son secrétaire[3] ; Gribelin, en civil, servira de greffier à Du Paty.

Cochefert dicta la réquisition ministérielle qui l’investissait lui-même[4]. Mercier signa l’ordonnance qui désignait Du Paty « pour procéder, en qualité d’officier de police judiciaire, à l’instruction à suivre contre le capitaine Dreyfus, inculpé de haute trahison[5] ».

L’ordonnance visait les articles 76 et suivants du Code pénal qui sont relatifs à la trahison. Le fait poursuivi était qualifié à tort de « haute trahison », crime spécial qui ne peut être commis que par le Président de la République[6].

Les instructions de Mercier furent très précises. Du Paty procédera, sitôt la dictée terminée, à un interrogatoire sommaire de Dreyfus. Après l’interrogatoire, il le remettra aux mains du commandant Henry pour être incarcéré au Cherche-Midi. Il se rendra aussitôt au

  1. Rennes, III, 506, Du Paty. — Voir Appendice III.
  2. Ibid.
  3. Rennes, I, 583 ; III, 520, Cochefert.
  4. Rennes, I, 583, Cochefert.
  5. Cass., III, 4, rapport Ballot-Beaupré. (Ordonnance datée du 14 octobre, signée : Mercier ; cote 1 du dossier)
  6. Art. 6 de la Constitution.