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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


babilités à ces matières n’est pas légitime ; 2° parce que la reconstitution du bordereau est fausse ; 3° parce que les règles du calcul des probabilités n’ont pas été correctement appliquées, en un mot, parce que leurs auteurs ont raisonné mal sur des documents faux » ;

Attendu, encore, que les mêmes experts ont prouvé que les deux encoches, entre lesquelles on cherchait à établir une corrélation, avaient été faites l’une et l’autre postérieurement à la saisie des deux pièces, — que « l’encoche du bordereau » n’existait pas auparavant sur le document original, et que « l’encoche de la lettre du buvard », provient de ce que « celle-ci a figuré dans un scellé ouvert, dont les pièces étaient maintenues à l’aide d’une ficelle passant dans une encoche au bas du scellé » ;

Attendu que, les études graphologiques de Bertillon et autres, devant, par suite, être éliminées du débat, il reste acquis que le bordereau a été écrit par Esterhazy et non par Dreyfus ;

Attendu que, le bordereau ayant été écrit par Esterhazy, on ne comprend pas, dans l’état de la procédure, comment les pièces, dont il annonçait l’envoi, auraient étés fournies par Dreyfus puisqu’on n’allègue même pas qu’ils se soient connus ;

Mais attendu que, pour l’accusation, le texte seul de cette lettre-missive, quelle que soit l’écriture, impliquerait par lui-même un acte de trahison imputable à un officier d’artillerie ayant passé par les quatre bureaux de l’État-major général, conséquemment stagiaire de deuxième année, lequel ne pourrait être que Dreyfus ;

Qu’il est donc indispensable de se prononcer à cet égard ;

En ce qui concerne le texte du bordereau :

Attendu qu’aux termes de l’arrêt des Chambres réunies du 3 juin 1899, Dreyfus était accusé « d’avoir, en 1894, pratiqué des machinations ou entretenu des intelligences avec une puissance étrangère ou un de ses agents, pour l’engager à commettre des hostilités ou entreprendre la guerre contre la France ou pour lui en procurer les moyens