Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/430

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
420
HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS

Comme il venait de regagner sa place, Syveton s’approcha de lui, le souffleta avec tant de violence que le vieux soldat tomba sur son pupitre.

Une vague humaine, cent députés descendus de leurs bancs, rejeta Syveton vers les gradins de l’extrême-Droite, « où quelques amis le protégèrent[1] ».

Brisson suspend la séance, puis, à la reprise, propose la censure avec exclusion temporaire. Toutes les Gauches, la majorité de la Droite, la votent. Syveton refusant de quitter la salle, où il ne devait plus rentrer, il fallut chercher la troupe.

Déroulède le félicita « d’avoir souffleté tout un régime[2] », Barrès « d’avoir accompli un de ces actes qui, bien plus qu’aucun discours, agissent sur l’âme des partis[3] ».

La délation, les lettres de Mollin, les fiches, tout disparut, pour une heure, devant l’ignoble agression. L’ordre du jour de confiance fut adopté à une forte majorité[4].

André dit que, « se croyant seul visé », il se résolut, « sans avoir reçu aucun conseil, subi aucune pression »,

  1. Bonnamour, G. Syveton, 147.
  2. Dépêche de Saint-Sébastien du 5 novembre 1904.
  3. Lettre à Syveton, citée par Barrès dans l’Éclair du 8 décembre 1907 : « Ce qu’il faut savoir de l’affaire Syveton ».
  4. Par 297 voix contre 221. — Les principaux « dissidents », Leygues, Millerand, Barthou, Doumer, s’abstinrent. — L’ordre du jour, signé de Bienvenu-Martin, Berteaux, Jaurès et Thomson, était ainsi conçu : « La Chambre, convaincue que le devoir de l’État républicain est de défendre contre les exigences de l’esprit de caste et de réaction et par les moyens de contrôle réguliers dont il dispose, les fidèles et courageux serviteurs de la République et de la nation, compte sur le Gouvernement pour assurer, dans le recrutement, et l’avancement des officiers, avec la reconnaissance des droits, des mérites et des services de chacun, le nécessaire dévouement de tous aux institutions républicaines… »