Galliffet avait fait venir à Paris, l’un des rares officiers qui se fussent prononcés du premier jour pour la Revision, intelligent, ferré en droit, mais ardent et le laissant trop voir, et qu’on disait juif, à cause de sa femme qui l’était. Dautriche, longuement interrogé, maintint à la fois ses aveux et ses explications ; Rollin, François et Mareschal, cités comme témoins, se trouvèrent tous trois aussi complètement d’accord pour se rappeler les moindres détails de l’opération avec Austerlitz que, précédemment, pour en avoir à peu près tout oublié, Comme ils persistèrent à déclarer qu’ils avaient agi « par l’ordre des chefs[1] », Delanne et de Lacroix leur donnèrent « un démenti formel[2] ». Delanne a cru signer « une simple mesure d’ordre, ayant pour effet de faire passer d’une caisse dans une autre des fonds déjà affectés au service des Renseignements ». « S’il lui avait été donné une autre explication », « il aurait décliné sa compétence » ; l’affaire eût été du ressort du chef d’État-Major et, en son absence, de l’autre sous-chef, de Lacroix, qui rentrait le lendemain. Delanne « n’a connu le nom d’Austerlitz que le jour de sa déposition à la Cour de cassation[3] ». Pour de Lacroix, il n’avait rien su des négociations qui précédèrent « l’inadmissible » dépense de 25.000 francs ; il n’en avait pas été informé à son retour et il n’avait aucun souvenir d’avoir, même par la suite, eu sous les yeux la fourniture de l’espion[4]. Enfin, Cassel saisit la lettre de Dautriche à François[5], qui était devenue le thème des trois officiers. Leur culpabilité parut ainsi évidente. André, sitôt qu’il connut
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L’ENQUÊTE
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