Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/258

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
248
HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


Picquart[1], « de la jeter à la face du gouvernement ». Méthodique et prudent à son ordinaire, il conseilla à Dreyfus d’adresser une simple demande d’enquête au ministre de la Guerre ; Dreyfus s’appuiera à la fois sur le bordereau annoté et sur la déposition de Cernuski[2]. La plupart des ministres semblaient fort indécis sur la portée de l’ordre du jour voté par la Chambre. Combes eut le courage d’être un peu subtil. André, s’il procédait à l’enquête « administrative » qu’avait réclamée Jaurès, méconnaîtrait la volonté de la Chambre ; il reste libre de regarder lui-même aux dossiers de l’Affaire, d’y chercher la preuve ou le démenti des accusations que l’orateur socialiste, d’une part, Lasies, de l’autre, ont portées à la tribune. Comme André, semble-t-il[3], hésitait encore, la lettre de Dreyfus le mit en face « d’une question précise, impossible à éluder[4] ».

  1. « Dreyfus se doit de faire oublier sa trop longue inaction après la grâce acceptée. Le seul moyen, c’est de Jeter à la face du Gouvernement la demande en revision de son procès. » (Picquart, dans la Gazette de Lausanne du 11 avril 1903.)
  2. 21 avril 1903. (Cass., IV, 632.)
  3. Clemenceau : « Combes avait couvert André dès le premier jour. » (Aurore du 1er décembre 1903.)
  4. Picquart, dans la Gazette de Lausanne du 24 avril 1903. — Il avait écrit précédemment : « Espérons que le général André osera enfin jeter un coup d’œil sur le fameux dossier secret de l’Affaire Dreyfus, qui lui a été transmis sous scellé par son prédécesseur avec la consigne de n’y point toucher. » (11 avril.) — Galliffet n’avait transmis à André aucune consigne d’aucun genre, s’était contenté de lui faire remettre par Davignon les clefs et les dossiers des affaires courantes ; il ne l’avait point vu, avait refusé de le recevoir. (Cinq ans, 21.)