cédentes[1] ; cela était plus sûr que de discuter avec Bertulus, Picquart et moi, qui demandions à être entendus.
D’autres aussi le demandaient, dont la parole inspirait encore plus d’appréhensions. C’étaient Charavay qui, sous les reproches de Monod et ses propres remords, convint enfin de son erreur de 1894 et attribua formellement le bordereau à Esterhazy[2] ; et l’un des juges de Dreyfus, le capitaine Freystætter, qui, lui aussi, avait ouvert les yeux et tenait à honneur de décharger sa conscience.
VIII
Freystætter, depuis la condamnation de Dreyfus, n’avait pas été à l’abri d’inquiétudes qu’il avait mal calmées. D’abord, il s’émut aux protestations de Dreyfus pendant la parade ; puis, la lecture des journaux antisémites, un entretien qu’il eut avec un prêtre, lui firent entrevoir l’horreur d’une vengeance religieuse ; enfin, il s’étonnait de la mentalité de quelques-uns des officiers « qui avaient été appelés à préparer la victoire[3] ». Pourtant, il se rassura, quand un officier de la garde républicaine lui raconta que Dreyfus avait fait des aveux à Lebrun-Renaud et, s’étant embarqué peu après pour le Dahomey[4], il y prit le commandement d’une compagnie de tirailleurs sénégalais, la