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CAVAIGNAC MINISTRE


étrangers[1], — deux de ces pièces étaient des faux de la façon de Lemercier-Picard, — et qu’elle concordait aussi avec la fausse version de la dépêche du 2 novembre.

Il jugea excellentes toutes les autres pièces, y compris les plus fausses, « la masse des documents »[2] d’Henry.

Il avait établi, et depuis longtemps, sa conviction personnelle sur une base plus solide, sur la preuve morale, psychologique, bien supérieure aux expertises d’écriture, à tous les renseignements d’espionnage, qui, à elle seule, suffisait à faire la certitude d’un honnête homme (c’était l’argument favori de Rochefort) et qui, du premier jour où il la connut, avait illuminé sa hautaine perspicacité de puritain étriqué et bilieux : « Dreyfus a avoué. »

Toutefois, même cette preuve « absolue ».[3], son devoir était de la contrôler, de la passer au crible de sa critique, et il n’y manqua pas, procédant toujours de même, l’un des plus étonnants mélanges qui fût jamais de judiciaire et de sottise, d’initiative et de crédulité.

Ayant observé que le dossier contenait seulement des pièces postérieures de trois ans à la dégradation, sauf la lettre (antidatée) de Gonse à Boisdeffre[4], il voulut des documents contemporains, « du jour même »[5], et fit venir Lebrun-Renaud. L’officier (chapitré au préalable) confirma, en conséquence, le récit de sa conversation avec Dreyfus, tel qu’il l’avait écrit au mois d’octobre précédent, sous la dictée de Gonse[6] ; et, comme

  1. Cass., I, 36, Cavaignac, discours du 7. — De même Roget (Cass., I, 122) et Cuignet (I, 374). — Voir t. II, 417.
  2. Cass., I, 40, Cavaignac.
  3. Discours du 7. — Cass., I, 87 ; Rennes, I, 182, Cavaignac
  4. Voir t. III, 288.
  5. Discours du 7.
  6. Voir t. II, 576.