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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


avis répétés d’Hennion à Dupuy. Il avait signalé à la dernière heure que le rendez-vous était à la place de la Nation[1]. Mais Dupuy s’était obstiné à masser le gros des forces de police, avec le Préfet, à l’Élysée et à la place Beauveau, où il eût été bien tard pour arrêter une émeute populaire et militaire, qui aurait déjà traversé, en se grossissant, la moitié de Paris.

Il était environ 4 heures et demie quand l’arrivée des troupes qui revenaient du Père-Lachaise fut signalée à Habert ; il fit avertir Déroulède[2], qui descendit enfin sur la place, laissa passer les Saint-Cyriens et la garde républicaine, fit signe à ses amis et se porta vivement, suivi d’environ deux cents hommes[3], vers l’avenue de Taillebourg, qui débouche à droite des deux colonnes de la barrière du Trône et où il entendait les tambours et les clairons. On apercevait un général à cheval. Guérin, s’approchant, l’interrogea : « Est-ce lui[4] ? »

    Goulier, qui se trouvait au café Arago, assista à la tentative de Déroulède, mais sans y intervenir. (83, Goulier.) Un inspecteur, à bicyclette, suivit les émeutiers jusqu’à la caserne de Reuilly. (I, 76, dépêche au préfet de police.) — À l’audience, de la Haute Cour, l’un des avocats (Me  Quentin) constata que Dupuy, malgré les rapports d’Hennion, « n’avait pris aucune précaution, comme il eût été de son devoir de le faire ». (5 décembre 1899.)

  1. 23 février 1899 (3 heures du soir). — À 3 heures et demie, le sous brigadier Génin télégraphia que Déroulède se dirigeait vers la place. (Haute Cour, I, 75.) C’était la bande d’Habert.
  2. Instr. Pasques, 38, Habert.
  3. Ibid., 12, Roget ; Gauchotte, colonel du 4e de ligne ; 24, sapeur Pager ; 33, Déroulède : « Un peloton d’amis à moi… etc. » — 79, Baillière : « Déroulède m’a fait un signe dans lequel j’ai compris : Ça y est, nous allons agir. »
  4. Ibid., 67, Peretti. Déroulède aurait répondu : « Celui-là ou un autre, cela ne fait rien. » À la Haute Cour (20 novembre), Guérin et Déroulède conviennent de leur rencontre, mais sans relater ce dialogue. Spiard raconte que Guérin l’avait envoyé au-devant de la troupe pour s’assurer si c’était Pellieux qui la conduisait (98).