Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1904, Tome 4.djvu/601

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion
597
MORT DE FÉLIX FAURE


large et qui doivent ouvrir leurs instructions en mer[1] ». Lasies, qui n’espérait plus que le mouvement tournerait au profit du prince Victor, s’y trouvait aussi[2] et se promenait parmi les groupes, pendant que Guérin, les mains dans ses poches, plaçait ses bandes, les antisémites, qui étaient arrivés par petits groupes, armés de revolvers, et les malandrins (à 3 francs) de Sabran. Les incidents de la nuit l’avaient confirmé dans son plan de surveiller les événements et, si quelque chose se passait, d’en être[3]. Il y avait donc là un peu plus d’un millier d’individus[4], les uns à Déroulède, les autres à Guérin, qui étaient tout prêts à un coup de main, si l’armée se laissait détourner, et autant de badauds et de curieux. Et « pas un seul agent de police[5] », malgré les

  1. Haute Cour, 16 décembre 1899, Thiébaud. — Il avait déjeuné avec Déroulède et quelques amis (dont Andrieux, l’ancien préfet de police, Barillier et Barrès) et s’était rendu à la place de la Bastille, mais il n’alla pas plus loin. — Instr. Pasques, 37, Habert ; 66, Carnat, officier de paix. Il dit qu’il n’a pas entendu Habert donner ces ordres ; sinon, il se serait rendu à la place de la Nation.
  2. Ibid., 10, Lasies. — Roget convient de l’avoir aperçu sur la place, entre autres « figures de connaissance ». (16.) — Dans le monde bonapartiste, on était au courant des projets de Déroulède. À midi, la baronne Lepic télégraphia à sa mère, à Bruxelles : « Ici, presque révolution. Déroulède avec Petit Chapeau et mille hommes marche sur l’Élysée. On va faire appel au peuple. On croit duc d’Orléans ici. Prince Henri grandes chances. » Appelée à déposer, Mme Lepic expliqua que sa dépêche « était le résumé de tout ce qui se racontait dans les salons ». (Haute Cour, VII, 160.)
  3. Guérin avait amené un fiacre avec plusieurs caisses de cartouches (4.000). « Les antisémites étaient prêts à se servir de leurs armes. (Rapport Hennion ; ; Spiard, 97 ; Haute Cour, IV, 68, Peretti ; V, 180, Leproust ; 185, Ribourg, etc.) Le cocher de Guérin démentit le récit de Peretti. (28 novembre 1899.) — Sabran et Guixou-Pagès étaient restés à la place de la Bastille.
  4. 4.000 ligueurs, selon Baillière (79), 5 à 600, selon Jarzuel (82).
  5. Instr. Pasques, 38, Habert. — Cette absence de la police ressort de toutes les dépositions. Le commissaire de police