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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


Dreyfus. Bien plus, le contre-espionnage avait signalé, à plusieurs reprises, le principal agent de Schwarzkoppen, sans le nommer, mais avec des traits caractéristiques ; l’un de ces rapports était antérieur de peu de jours au petit bleu. Nécessairement, Henry n’en avait rien dit à Picquart. Cuignet n’y fit aucune allusion.

Il convint toutefois que les « fuites » avaient continué à l’État-Major, depuis 1895, et que, précédemment, Schwarzkoppen y avait d’autres agents[1].

Le dernier mirage s’était évanoui. Le dossier secret était aussi vide que le dossier judiciaire. Il était temps de dessaisir lia Chambre criminelle.

V

Un fol n’est pas un fou. Les fols circulent à travers le monde et, parfois, le gouvernent.

Quesnay, le président de la Chambre civile, était un de ces hommes d’ambition qui ne se trouvent jamais à leur place, parce qu’ils jugent toujours leur mérite supérieur à leur fortune. Son arrière-grand-père, l’économiste, eut de la marquise de Pompadour les terres de Beaurepaire et de Glouvet. Les Quesnay prirent le nom de Beaurepaire, qui leur donnait un air de noblesse ; le magistrat, tourmenté de la manie d’écrire, signa de celui de Glouvet ses romans, dont quelques-uns sont agréables. Il avait débuté, sous l’Empire, dans les parquets, démissionna au début de la Guerre, et parut, dans les clubs de Paris, en costume éclatant de franc-

  1. Cass., I, 373, Cuignet. Voir Revision du procès de Rennes, 267, Mornard.