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LA SOUSCRIPTION HENRY


Brisson et de Zola, 41 à celle de Bard, 43 à celle de Picquart, 48 à celle de Lœw, 58 à celle de Clemenceau, 929 à la mienne[1]. C’était l’étiage des popularités.

Des centaines de pages sont pleines de phrases comme celles-ci :

Pour pendre Reinach… Pour le cravacher… Sept balles pour l’ignoble Orang… À moi la peau de Reinach !… Pour lui sortir les boyaux… Pour l’étrangler… Pour l’écorcher vif… Une botte de foin à Brisson… À la lanterne Reinach !… Pour lui fumer les jambons… Contre l’espion anglais Clemenceau… À la frontière Jaurès !… Clemenceau, Reinach et Brisson à Montfaucon !… Pour flamber le gorille… À la potence !… Contre le cochon de juif Reinach, sept officiers de Bretagne… Quatre sous de la tête de Reinach… Pour saigner le porc Reinach… Pour l’étriper… Pour avoir les boyaux de Dreyfus et de Reinach… Pour étaler l’opprobre de Brisson… Six bons b… qui ont donné sur le museau à Pressensé… Pour pendre Zola… Pour pendre Lœw… Dreyfus et Picquart au bagne !… Reinach à l’égout !

Sur ces milliers de manifestants, très peu étaient convaincus, dans leur for intérieur, qu’Henry fût un héros. Par contre, leur haine était sincère contre le Juif qui fit toujours la coalition de toutes les forces d’en haut et d’en bas, parce que tous les contrastes sont en lui, à la fois mystique et positif, le seul peuple qui n’a eu qu’un Dieu et le seul qui considère la vie comme l’unique

  1. Manau est nommé 32 fois, Hervé de Kérohant 22, Yves Guyot 20, Jaurès 19, Pressensé 18, Rothschild 14, Trarieux et Rouanet 13. — La Ligue des Droits m’adressa, le 3 janvier 1899, « l’expression de sa sympathie », protestant que « je n’avais point outrepassé mon droit d’historien en cherchant à établir que l’auteur du faux de 1896 était également le complice du traître qu’il voulait sauver ».