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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


fourrager dans tous les mauvais coups. On le voyait toujours en mouvement, de Versailles, où était son couvent, à Paris, où il avait, outre sa cellule officielle, plusieurs petits pied-à-terre pour y recevoir des émissaires des deux sexes, ne confiant jamais ses lettres à la poste, mais à des courriers qui avaient fini par être connus de la police, enchanté, dans son intérieur, du bruit qui se faisait autour de lui, ce qui eût dû suffire à le faire disgracier par sa Société, et le plus nigaud des conspirateurs, parce qu’il était le plus présomptueux.

Ceux des catholiques qui avaient de la pitié et le sens du droit, et qui prévoyaient des représailles, furent désolés. Viollet multiplia les avertissements[1] ; un prédicateur (à Saint-Sulpice) osa dénoncer « le journal qui abritait ses fureurs sous le signe de la Rédemption »[2]. Non seulement on ne les écouta pas, mais plusieurs, qui pensaient comme eux, furent frappés. Buffet, dans une lettre à Drumont, ayant désavoué Hervé de Kérohant, le duc d’Orléans écrivit à son représentant : « J’approuve pleinement votre lettre à la Libre Parole et je vous en

    Gouvernement de la République, mais à la veille même de sa mort, il envoyait encore « sa bénédiction spéciale » à « Sa Paternité Révérendissime », le P. Bailly, élu supérieur général de sa congrégation. Rampolla écrivit au fondateur des Croix : « Sa Sainteté ne doute pas que, malgré les adversités de l’heure présente, vous saurez maintenir et même accroître encore ce prestige dont jouit votre institut, prestige que ses œuvres ont mérité de lui procurer… De votre Paternité Révérendissime, le très affectionné dans le Seigneur, M., Cardinal Rampolla. De Rome, le 25 juin 1903. »

  1. Temps du 23 novembre 1898, Siècle du 10 décembre, etc.
  2. C’est ce que dit également Quincampoix, l’auteur de la Voix d’un catholique : « La décence publique souffre de cette exhibition constante dans un tel cadre, en un tel lieu, du symbole trois fois saint de la charité et de l’amour. C’est rendre Jésus-Christ solidaire de ces faux apôtres. » (35.)