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CHAMBRE CRIMINELLE


voyaient des fleurs ; de toutes les parties du monde, il reçut des lettres admiratives. Il ne doutait pas qu’il serait condamné si on le jugeait, mais il n’en avait pas peur, se sentant vainqueur au delà des passagères défaites.

IX

Précisément à cette date, la Chambre criminelle ordonna qu’il lui fût amené. Elle venait d’entendre Roget qui l’avait violemment chargé.

Roget, qui n’avait pas été mêlé au procès de Dreyfus, — sauf que ses notes, peu favorables à l’officier juif, aidèrent fort à orienter Fabre et d’Aboville[1], — avait été désigné par Zurlinden comme l’homme qui connaissait le mieux l’Affaire, pour l’avoir étudiée, pendant plusieurs mois, dans les dossiers. Et, comme il en était lui-même convaincu, sans s’arrêter à ce détail qu’aucune pièce ne lui avait paru plus probante que le faux d’Henry, il avait déposé tout de suite après les cinq ministres[2], d’une faconde intarissable et avec une insolence extrême d’affirmation. Les rares questions qui coupèrent à de longs intervalles son « monologue[3] », quelques haussements d’épaule d’un des juges (Dumas) lui parurent des manques intolérables de respect[4].

Un témoin est un homme qui a vu ou qui a entendu par lui-même ; Roget plaida.

Tous les « actes de trahison » qui ont été commis

  1. Voir t. I, 58.
  2. 21, 22, 23 et 24 novembre 1898.
  3. Enq. Mazeau, 89, Bard.
  4. Ibid., 27 et 28, Roget : « J’ai été, à plusieurs reprises froissé… etc. »