se présenta fort tranquillement devant les Chambres[1]. C’était sa force de ne s’étonner de rien. (De quoi se fût-il étonné, puisqu’il se trouvait pour la troisième fois premier ministre ?) Il avait du courage, qui allait à la brutalité, un gros bon sens qui passait jusqu’au cynisme, et de la ruse, qui n’était pas toujours adroite.
La substance de sa déclaration fut que l’armée, « qu’il défendra contre les attaques et d’injustes solidarités », « ne peut travailler utilement que dans le recueillement et le silence », et « que l’œuvre de la justice ne demande pas moins de calme et moins de respect ». Aussi bien, « cette affaire ne saurait absorber plus longtemps les préoccupations du pays ». Il exposa un programme de réformes qui eût suffi à honorer une législature, mais qui parut précaire. Les pensées étaient ailleurs. Le matérialisme politique le plus robuste ne résistait pas à cette inflammation générale.
Mirman interpella, parla longuement de tout pour ne rien dire, sans qu’on sût s’il était pour ou contre le ministère, méchant à son ordinaire, soutenu à gauche quand il parla des influences cléricales dans l’armée, à droite quand il conseilla de perquisitionner chez « certains capitalistes puissants », chez Rothschild et chez moi.
Dupuy répondit par un solide discours de bonne humeur. Il ne réclame pas de nouvelles lois répressives pour protéger l’armée, « bien qu’on lui attribue le tour de main nécessaire », et il fera observer les décisions des magistrats. Enfin, il « s’appuiera seulement sur une majorité républicaine ». Cassagnac : « Vous aviez le fusil sur l’épaule droite ; vous l’avez sur l’épaule gauche. » Dupuy : « Dans une armée en marche, quand on est fatigué d’avoir le fusil sur une épaule, on le met sur
- ↑ 4 novembre 1898.