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CHAPITRE IV

CHAMBRE CRIMINELLE

I

À chaque tournant, la Justice s’est heurtée à une embûche. Trois ministres de la Guerre ont jeté leur porte-feuille dans la balance. Le principal témoin de Dreyfus est en prison. La canaille a été mobilisée par un prince. Rien n’y a fait. Ni les combattants de la première heure, ni Brisson, ni les juges ne se sont laissé intimider. — Ni le Gésu ni la haute armée ne désarmèrent.

Faure continua son double jeu. Il avait trouvé, à l’usage des quelques revisionnistes qui s’aventuraient encore à l’Élysée une maxime commode : « Le Président écoute et ne répond pas. » Ou il commentait la consigne qu’il avait dictée à sa maison militaire : « La loi est tout. L’armée n’existe que par la loi. C’est la loi qui ordonne l’obéissance aux chefs ; la loi seule fait la force de l’armée… L’armée n’est ni Dreyfus, ni Esterhazy, ni Henry, ni Du Paty. C’est la servir que de condamner