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BRISSON


noine, s’abandonna ensuite lui-même, fut battu sans combattre.

Les groupes s’étaient réunis dès le matin. Les radicaux, résignés presque tous à la Revision, décidèrent de soutenir Brisson ; les modérés, de le renverser. Barthou leur tint un discours véhément. Il ne blâmait pas le Gouvernement d’avoir ordonné la Revision, mais la façon dont il avait engagé la procédure ; et « Brisson n’a pas défendu l’armée ». Le ministère a commencé par solliciter le concours des antisémites et des nationalistes ; il en a vécu jusqu’aux aveux d’Henry ; « si maintenant il vient faire appel à l’union des républicains pour repousser des menées césariennes, les progressistes n’ont pas confiance en lui pour cette tâche »[1].

Au conseil des ministres, Brisson résuma la réponse qu’il se proposait de faire aux interpellations[2] sur l’affaire Dreyfus ; Chanoine ne fit aucune objection. Cependant, un petit incident faillit tout déranger. Brisson, quand il désigna ceux des ministres qui l’accompagneraient à la Chambre et ceux qui se rendraient au Luxembourg, l’indiqua pour le Sénat. Chanoine, encore une fois, ne souffla mot, mais, en sortant, demanda à Lockroy de permuter avec lui[3]. Il rentra alors au ministère et inscrivit au tableau d’avancement tous ses officiers d’ordonnance[4].

Les députés, quand ils se rendirent au Palais-Bourbon, à l’heure ordinaire, trouvèrent les abords de la place de la Concorde envahis par une foule bruyante, les bandes

  1. Temps du 26 octobre 1898.
  2. Interpellations Fournière, Georges Berry, Breton, de Grandmaison et Millevoye.
  3. Je tiens ce récit de Lockroy.
  4. Ces décisions, antidatées du 22 octobre, parurent le 26 au Journal Officiel,