Toute la Chambre, quand il revint à sa place parmi les autres ministres, à la fois radieux et inquiets de son magnifique succès, se leva pour l’acclamer. Les césariens[1], surtout, déliraient, réclamant à grands cris l’affichage, et les radicaux appuyèrent, mais protestant, par manière de surenchère, contre la demande d’un scrutin public, parce que « tous les Français sont unanimes quand il s’agit de la patrie[2] ».
Et ce fut aussi l’avis de Brisson, qui tint à dire que Cavaignac avait parlé « au nom du Gouvernement ». (Il ne voulait pas laisser au seul ministre de la Guerre, dont il redoutait l’ambition, la gloire d’un tel discours.) « Les partis, dit-il, doivent se donner les uns aux autres cette preuve de confiance » de voter, par mains levées, l’affichage. Cependant la droite insista[3], et l’on vota au scrutin, à l’unanimité.
Quinze socialistes[4] seulement s’abstinrent, et Méline[5].
Le soir, à l’État-Major, dans le cabinet de Gonse, pendant que tous les officiers triomphaient, Henry, songeur,
- ↑ Déroulède, Marcel Habert, Cassagnac, auxquels se joignirent Humbert et Mirman, qui signa la proposition d’affichage.
- ↑ Dujardin-Beaumetz.
- ↑ Le marquis de la Ferronnays, Denys Cochin, Reille, le marquis de Solages, Piou, de Ramel, du Halgouët, etc.
- ↑ En séance publique, le dépouillement du scrutin avait donné deux bulletins contre ; mais Fournière et Grousset, qui les avaient déposés, rectifièrent leur vote. L’affichage fut voté par 545 voix. — Castelin dit qu’il « avait satisfaction et qu’il retirait son interpellation ». — Brisson explique, dans ses Souvenirs, que, s’il n’était pas intervenu sur l’affichage, la Chambre aurait voté un ordre du jour, « précis et impératif », lui enjoignant de poursuivre le « Syndicat », les « amis du traître », etc. « Le Gouvernement aurait eu les mains liées. » (Siècle du 23 novembre 1903.) Brisson l’aurait donc accepté ?
- ↑ Dupuy eut moins de pudeur et vota.