Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1904, Tome 4.djvu/279

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
275
BRISSON


puyée par Esterhazy[1], séduisit beaucoup d’imaginations excitées, avides de merveilleux, désireuses d’ajouter aux crimes de l’État-Major ; elle s’incrusta dans les cerveaux. Il y avait, parmi les revisionnistes, des amateurs des chroniques italiennes et, aussi, des amateurs de Gaboriau : l’officier masqué, porteur de l’ordre de mort, remplaça la dame voilée. — On avait pris une telle habitude de l’extraordinaire qu’on croyait tout pêle-mêle. Impossible de distinguer le vrai du faux. L’atmosphère, un instant clarifiée, s’épaissit à nouveau.

X

Les événements se précipitèrent dans un grand fracas, éloignant une fois de plus la Revision, la repoussant si loin qu’on put la croire perdue, la ramenant pour la troisième fois.

Le 17, quand Zurlinden, se sentant battu, avait quitté la salle des séances, il avait demandé à Brisson quelle suite il fallait donner à sa plainte contre Picquart. Brisson, au lieu de réclamer le dossier pour Sarrien, l’affaire étant connexe à celle de Dreyfus[2], lui répondit de le passer à son successeur. (On l’eût dit condamné à ne jamais profiter de la victoire.) Le lendemain, quand

    donner à choisir entre la dégradation suivie des travaux forcés, ou la mort avec l’Affaire étouffée et la pension militaire à sa veuve. » (Aurore du 24 septembre 1898.) — Ce sera également la version de Gohier : « Cette brute était un prétorien parfait ; cet homme-là ne pouvait pas se tuer. » (5 novembre.)

  1. Dessous de l’Affaire, 70 ; Dép. à Londres (éd. du Siècle).
  2. Cour de cassation, arrêt du 3 mars 1899.