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LA MORT D’HENRY


est arrivé : j’ai reçu l’en-tête et quelques mots. — Quels mots ? — D’autres choses qui n’avaient pas trait à l’Affaire. — Ainsi, voici ce qui est arrivé : vous avez reçu en 1896 une enveloppe avec une lettre dedans, une lettre insignifiante ; vous avez supprimé la lettre et vous avez fabriqué l’autre ? — Oui. »

Cavaignac s’arrêta.

Il lui avait fallu une heure pour obtenir ce « oui », l’explicite et irrévocable aveu[1].

C’eût été le moment ou jamais de saisir l’homme à la gorge, de lui faire cracher toute la vérité sur l’Affaire.

IX

Cavaignac ayant donné à Roget l’ordre de conduire Henry dans une pièce voisine et de « l’y garder à vue »[2], Boisdeffre prit une feuille de papier sur le bureau du ministre et écrivit[3] :

Paris, 30 août.
Monsieur le Ministre,

Je viens d’acquérir la preuve que ma confiance dans le colonel Henry, chef du service des Renseignements, n’était pas justifiée. Cette confiance, qui était absolue, m’a amené à être trompé et à déclarer vraie une pièce qui ne l’était pas et à vous la présenter comme telle.

Dans ces conditions. Monsieur le Ministre, j’ai l’hon-

  1. Procès-verbal : « L’heure à laquelle a fini l’interrogatoire n’a pas été consignée ; il pouvait être de 3 h. 15 à 3 h. 30. »
  2. Ibid., 104.
  3. Rennes, I. 529, Boisdeffre.