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CAVAIGNAC MINISTRE


immédiate[1] ». On l’avait laissé dire, ce qu’il prit pour un assentiment. Maintenant, il poussait aux moyens d’exécution juridiques et pratiques, les examinait dans une note en cinq paragraphes, rédigée avec soin, motivée en termes de droit.

On peut supposer qu’il pressentit Félix Faure. Il est manifeste, à certains détails du projet, qu’il consulta un jurisconsulte, non pas Tézenas, trop compromis avec Esterhazy, mais peut-être Ployer, dont il avait hérité de Billot et qui l’avait déjà engagé à lancer Du Paty sur Picquart. Ce bâtonnier de l’ordre des avocats n’aimait rien tant que brouillonner dans les choses de la politique.

Ce qui porte à croire qu’un routier du Palais étudia l’Affaire, c’est l’indication exacte que Picquart et Leblois pouvaient être déférés à la Haute Cour « tant que l’ordonnance de renvoi n’aurait pas été rendue » par le juge de droit commun. Cavaignac n’eût pas trouvé cela tout seul. Il n’eût pas trouvé davantage que les dispositions de la loi sur l’espionnage « rentrent dans l’ordre » des crimes contre la sûreté intérieure ou extérieure de l’État qui sont de la compétence de la Haute Cour. « La loi constitutionnelle, en visant l’attentat contre la sûreté de l’État, ne l’a pas défini » ; il convient donc de se reporter aux auteurs et aux précédents.

La note expose deux systèmes :

1° Joindre à cette première poursuite des délits connexes, à savoir les diffamations de Zola contre le conseil de guerre, la dénonciation calomnieuse contre Du Paty (Cavaignac n’en démordait pas), et surtout « les délits commis par la voie de la presse, où l’on pourra relever à foison les outrages à l’armée et où se trouveront im-

  1. Note de Cavaignac.